La crise sanitaire a eu un impact mondial sur le monde du BTP, animant les inquiétudes du milieu du négoce qui est en bout de chaîne. Avec les prix des matériaux qui ont explosé ces six derniers mois, les produits rares deviennent des produits de luxe. Si certains grands groupes ont de quoi lutter, les négociants au point de vente unique s’interrogent sur l’avenir. Avec des chantiers ralentis et un marché qui risque d’imploser, la pandémie de la Covid-19 pourrait être responsable d’une pénurie mondiale qui prend de l’ampleur.
La crise et ses origines : état des lieux en 2021 📅
Depuis les premiers signes de la Covid en 2019, suivi d’un premier confinement en 2020, les chantiers font face à une pénurie de matériaux. Le monde du BTP fait face à un paradoxe : il n’y a jamais eu autant de carnets de commandes aussi bien remplis, mais pour des chantiers ralentis par une main d’oeuvre fragilisées par la pandémie et des matériaux qui ont bien du mal à arriver sur les chantiers
Une crise qui a secoué un marché global
La crise sanitaire a perturbé le fonctionnement d’un marché mondial : celui du BTP. Avec la désorganisation des filières d’approvisionnement, le redémarrage de l’activité dépendait de la politique de chaque pays. Les entreprises n’ont eu d’autres choix que de s’alimenter vers de nouveaux marchés ouverts, avec des matériaux souvent vendus au prix double.
Des matériaux de chantier devenus des denrées rares et disputés
L’acier a été une matière première en arrêt pendant plusieurs mois. Laurent Clisson, dirigeant de la branche acier du groupement de négociants Socoda, parlait d’un arrêt de « 50% de la production européenne »* d’acier. Le lent redémarrage des hauts fourneaux a eu pour conséquence des prix doublés sur la deuxième moitié de l’année 2020 et continue en 2021.
Quant à la politique de Donald Trump, elle n’avantage pas les négociants européens. En effet, les nombreux feux de forêt qui ont ravagé le territoire des Etats-Unis ont conduit l’ex-Président américain à taxer le bois canadien. Les entreprises outre-Atlantique achètent à prix d’or le bois à l’Europe, laissant les négociants européens sans matière première pour leur chantier.
Sans oublier la Chine, qui se lance aussi dans la course à l’achat, avec des prix du fret impactés par la crise. En conséquence, le prix de container en mer coûte le double aux négociants à ce jour…
Une situation complexe pour le négoce
L’Europe se retrouve au centre d’une course à l’achat des matières premières. Plus cher qu’en Amérique ou en Asie, l’Europe achète cher et vend moins qu’auparavant. Le négoce est au centre d’une situation complexe avec :
- Une météo difficile, pour des échanges transfrontaliers ralentis,
- La crise qui a provoqué la fermeture de négociants ou provoqué un ralentissement, qui a impacté directement le négoce,
- Une production d’invendus en hausse,
- La crise des scolytes depuis septembre 2018, etc.
La crise sanitaire a démontré que le négoce dépend des matériaux étrangers pour un bon fonctionnement, amenant le gouvernement à repenser notre système actuel, une fois la crise sanitaire passée.
Le négoce touché de plein fouet
Des entreprises ralenties dans leur production
Avec les confinements et couvre-feux successifs en France, les grandes et petites entreprises alternent les fermetures. Malgré une meilleure résistance face à la crise, les GSB (grandes surfaces de bricolage) ont plus de ressources mais sont menacées directement d’une fermeture de plusieurs points de vente stratégiques.
Cependant, le marché du négoce voit aussi une nouvelle porte s’ouvrir, notamment pour les petites enseignes et magasins. En effet, ces derniers voient accueillir en magasin cette clientèle habituée des grands magasins, en recherche d’une solution rapide et accessible.
Des solutions d’optimisation suffisantes ?
En vue de lutter et de prévenir la pénurie de matériaux de la Covid 19, des solutions sont mises en place avec :
- Une meilleure gestion des stocks, pour proposer des produits de substitution
- L’identification de fournisseurs alternatifs (Imports ou solutions légèrement dégradées)
- La renégociation de certains contrats qui impliquent un suivi fin de tous les engagements
- Une révision rapide et semi-permanente des conditions tarifaires (Achats et Vente)
- Une solidarité au travers des groupements d’achats
- Une anticipation de la reprise qui amène à plus de vigilance quant au surstockage
- La centralisation de toutes les actions capables d’améliorer la marge, en particulier le coût du transport, etc.
🚨Vigilance sur les contrats engagés
Des contrats plus restrictifs
L’avenir semble plus incertain car il n’y a pas de date de sortie de la crise. Si elle continue sur sa lancée, elle pourrait malgré tout générer des conséquences en cascade entre deux acteurs : les donneurs d’ordre du BTP et les négociants. La durée rallongée des chantiers, ainsi que la non-indexation systématique des prix, entraînent des risques quant à la rentabilité des chantiers. Les contrats risquent d’être plus restrictifs et difficilement signés par les négociants les plus modestes.
La lumière au bout du tunnel
Malgré tout, la crise est vécue et abordée par l’ensemble des négociants mondiaux du BTP. En conséquence, le monde du négoce n’a pas fini de tirer parti de la situation et se prépare déjà à rattraper son retard. D’un point de vue contractuel, les garanties fournisseurs risquent d’être plus élevées.
Malgré une flambée des prix, celle-ci devra faire face à une concurrence qui souhaite vendre plutôt que de risquer de ne pas vendre. Un rééquilibrage des prix naturel semble s’annoncer.
Dernier point important à souligner : la place du digital et de la numérisation des outils de travail. Dans les grandes et petites entreprises, la confiance des consommateurs est retravaillée en vue de la renforcer. Annonçant des solutions plus rapides et innovantes chez tous les négociants, cette accélération de leurs outils de travail devrait participer à l’équilibrage des prix et à des échanges fluidifiés dans le monde entier.
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*Extrait Le moniteur, « Après la flambée des prix, la menace de la pénurie », lemoniteur.fr le 31 mars 2021.
Article rédigé par DL Négoce